L’opération « de pur confort » des yeux tourne au cauchemar : l’hôpital des Quinze-Vingts à Paris condamné

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Le tribunal administratif de Paris a condamné l’Hôpital national des Quinze-Vingts, dans le 12e arrondissement de la capitale, à verser 146 000 euros à un ancien patient resté handicapé après une opération « de pur confort » aux yeux. Cet homme de 37 ans avait consulté un médecin pour une « chirurgie réfractive » au « laser Lasik » pour corriger sa myopie et avait été opéré le 27 janvier 2014. 

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Déformation progressive de la cornée

Mais, deux ans plus tard, l’ancien patient avait ressenti une baisse d’acuité visuelle : il s’était alors vu diagnostiquer une ectasie cornéenne bilatérale, c’est-à-dire une déformation progressive de la cornée. Un traitement lui avait été administré pour ses deux yeux, et une intervention chirurgicale avait été programmée pour lui introduire un implant intra cornéen à l’œil gauche.

Le requérant s’est ensuite tourné vers le tribunal administratif de Paris : l’hôpital a « manqué à son devoir d’information », d’après lui, en « ne l’informant pas des risques de développer un kératocône » avec cette opération. Le médecin ne lui avait pas non plus « proposé d’alternative médicale à la technique du Lasik », ce qui est contraire au code de la santé publique.

Le patient regrette ses lunettes et ses lentilles

Sans cette opération, il aurait « conservé une bonne vision avec correction par lunettes ou lentilles », rappelait aussi son avocat.  L’établissement considérait pour sa part que le « défaut d’information » n’avait été à l’origine que de 20 % des préjudices de son patient. En tout état de cause, ses demandes indemnitaires devaient être ramenées à « de plus justes proportions ». 

« Lorsque l’acte médical envisagé, même accompli conformément aux règles de l’art, comporte des risques (…), le patient doit en être informé », commence par rappeler de façon générale le tribunal administratif de Paris dans une décision en date du 9 août 2024 et qui vient d’être rendue publique. « Un manquement des médecins à leur obligation d’information engage la responsabilité de l’hôpital dans la mesure où il a privé le patient d’une chance de se soustraire au risque lié à l’intervention en refusant qu’elle soit pratiquée. »

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Seul le cas où « l’intervention était impérieusement requise », de sorte que le patient ne disposait d’aucune « possibilité raisonnable de refus », empêche la reconnaissance de l’existence d’une telle « perte de chance ».

En l’occurrence, « le risque de développer une ectasie à la suite d’une intervention de chirurgie réfractive au laser Lasik constitue un risque grave normalement prévisible », rappelle le tribunal. Le CHNO indiquait avoir transmis « une information orale » à ce sujet à son patient, mais il n’apporte « aucun élément » pour l’établir et « ne conteste pas que son patient n’a pas été informé des autres solutions possibles ». Le requérant est donc « fondé à soutenir que le CHNO a manqué à l’obligation d’information » prévue par le code de la santé publique.

Il a perdu 500 euros de salaire par mois

De plus, l’état de la cornée de ce patient ne « contre-indiquait pas l’utilisation du Lasik » mais « avait pour effet de majorer les risques », alors même que sa myopie présentait « un caractère limité ». Cette opération de « pur confort » n’était par ailleurs « pas exigée par sa pratique professionnelle ». Dans ces conditions, la « perte de chance » d’éviter de telles séquelles a donc été évaluée à « 50 % ».

Le patient occupait jusque-là un emploi de « chargé d’affaires » dans le bâtiment depuis neuf ans, et avait dû être licencié car il ne pouvait plus conduire un véhicule et travailler sur un écran plus de trente minutes d’affilée. Désormais reconnu travailleur handicapé à cause de sa « fatigabilité visuelle », il occupe à présent un emploi de « commercial et relations humaines » où il gagne 500 euros par mois de moins qu’avant.

Le trentenaire avait aussi subi « des souffrances » évaluées à « 3 » sur une échelle de « 1 à 7 » ; il conserve par ailleurs « un déficit fonctionnel permanent de 20 % », détaillent les magistrats dans leur décision. L’ancien patient de l’Hôpital national des Quinze-Vingts avait par ailleurs gardé « des yeux rouges et larmoyants » après l’opération, ce qui lui vaut d’être indemnisé de son « préjudice esthétique temporaire ». Son « préjudice d’agrément » sera aussi pris en charge par l’hôpital : sa « perte d’acuité visuelle » l’a obligé à « arrêter sa pratique du tir sportif ».

Tous comptes faits, le CHNO a donc été condamné à verser 146 000 euros à verser au requérant. L’établissement de santé devra aussi prendre en charge les frais d’expertise médicale, évalués à 2 500 euros, et payer 1 000 euros de plus à son ancien patient pour ses frais de justice. Il a jusqu’au 9 octobre 2024 pour faire appel du jugement.

CB-PressPepper

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