« On nous a dit que tout allait bien » : les témoignages poignants de victimes de graves erreurs médicales

Chaque année, plusieurs centaines de milliers de personnes sont victimes d’erreurs médicales.
Souvent bénignes, elles peuvent aussi malheureusement briser des vies.
Une victime et des proches témoignent auprès de TF1.

Dans le jargon médical, on les appelle des événements indésirables graves associés aux soins (EIGS). Dans le langage courant, on parlera plutôt d’erreurs médicales . Dans les deux cas, elles sont difficiles à chiffrer : selon les associations de victimes, 400.000 sont commises chaque année, pour 50.000 décès, quand le ministère de la Santé en recense entre 60.000, évaluant à 70% celles directement liées à des facteurs humains. 

Mauvais dosage, prises en charge tardives ou défectueuses, diagnostics erronés, malentendus, accidents médicamenteux, erreurs d’identité… Les causes varient et les conséquences s’avèrent parfois dramatiques, comme le montre l’enquête du JT de 20H de TF1 à retrouver en tête de cet article.

« Aucun médecin n’a voulu reconnaître une erreur »

On y rencontre les parents de Marion Garin, restauratrice de tableaux, morte en 2015 à l’âge de 28 ans, après une chute à moto ayant nécessité sept points de suture et d’une attelle à l’hôpital d’Albertville (Savoie). « Au début, c’était le genou qui m’avait impressionnée, et puis deux jours après, c’est la cheville qui s’est mise à enfler », témoigne Martine, sa maman, photos à l’appui. « Mais on nous a dit que tout allait bien », se souvient son père, Didier. Sauf que deux semaines plus tard, l’état de la jeune femme se dégrade. « Un matin, elle nous dit qu’elle a très mal dormi, à cause de problèmes respiratoires », reprend le papa.

Aucun médecin n’a voulu reconnaître une erreur. C’était toujours le collègue qui aurait dû faire un examen plus approfondi

Le père de Marion, victime d’une erreur médicale

La jeune femme fera un malaise au bout de quelques heures. Et ne s’en relèvera pas. Une embolie pulmonaire foudroyante, consécutive à une phlébite contractée lors de l’immobilisation de sa jambe, deux semaines plus tôt. « Elle fait son malaise le 17 août et elle décède le 21, précise Martine. Mais aucun médecin n’a voulu reconnaître une erreur. C’était toujours le collègue qui aurait dû faire un examen plus approfondi… » Il aura fallu sept ans d’un combat judiciaire acharné pour qu’une infirmière et un médecin soient finalement reconnus responsables. Et pour que les parents apprennent que la mort de Marion aurait pu être évitée avec une simple piqûre d’anticoagulant.

Chaque opération, du reste, fait courir un risque de complication, inhérent à l’exercice de la chirurgie et de la médecine. Ex-metteuse en scène, Hélène Duhamel a, elle, été victime, fait rarissime, d’un AVC lors d’une intervention chirurgicale qui devait la guérir de ses douleurs chroniques au visage, en 2019. Elle est aujourd’hui prisonnière d’un corps qui ne répond plus, entre paralysie partielle et tremblements permanents. « Le chirurgien n’a pas trop parlé des risques, alors qu’il y en avait un, rembobine-t-elle. Il m’a dit qu’il était le spécialiste de Grenoble et de Genève. »

Quand on est dépendant pour tout, c’est horrible

Son compagnon, Xavier, a cru la perdre. « J’étais content qu’elle se réveille. Très content. Mais après, quelle souffrance ! Quand on est dépendant pour absolument tout, c’est horrible, confie-t-il. Le chirurgien a fait son travail de prévenir, mais c’est un peu comme les petites lignes du bas sur un contrat. Il faut savoir que dans moins de 2% des cas, les procédures aboutissent à un aléa thérapeutique. » C’est-à-dire la faute à pas de chance… Mais, même si le médecin n’a pas été inquiété, en théorie, le couple devrait bénéficier d’indemnisations prévues par la loi. En pratique, cinq ans après l’accident, Hélène et Xavier les attendent toujours.

Selon Me Hervé Gerbi, avocat spécialisé en droit du dommage corporel, les trois quarts des procédures aboutissent à des condamnations, mais les démarches sont particulièrement lourdes : « Déjà, comprendre le langage médical, on ne peut pas le faire seul. Il faut être assisté de ce qu’on appelle des médecins de recours. Ce qui fait que ces procédures sont les plus complexes et les plus longues. Les plus coûteuses, aussi, malheureusement pour les victimes. » Plusieurs associations, comme « Le lien », se chargent de fournir une aide légale. « On a le droit à l’erreur. On peut expliquer, insiste l’un de ses membres, le docteur Sauveur Boukris. Beaucoup de procédures pourraient être évitées si le médecin convoquait la famille ou la victime, pour dire qu’il y a eu une complication dont il s’est rendu compte en opérant. Quand vous essayez d’expliquer, vous apaisez. »


Hamza HIZZIR | Reportage TF1 : Léa MERLIER

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